Marwan Muhammad : « Nous (aussi) sommes la nation ! »

Marwan Muhammad, statisticien et militant associatif qui devient le directeur du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) en 2016 nous offre son décryptage sur les discours et les stratégies d’islamophobie.

Courageux et  intelligent, Nous (aussi) sommes la nation !  s’impose en ouvrage de référence de lutte contre l’islamophobie. Un bel espoir pour une société aussi juste qu’optimiste.

Marwan, votre livre s’intitule « Nous (aussi) sommes la nation ! » Comment est venu le choix du titre et à qui s’adresse–t-il?

Marwan Muhammad – Le titre du livre est tiré d’une campagne de communication qu’on avait menée en 2012 avec le CCIF. Il s’agissait de déconstruire les stéréotypes islamophobes en questionnant la notion d’identité et d’appartenance. Le slogan « Nous sommes la Nation » était tiré du serment du jeu de paume, un discours historique lors duquel les différentes parties du peuple s’étaient réunies pour proclamer leur unité. Nous avons rajouté le « aussi » pour dire qu’aujourd’hui, toutes les personnes, quelles que soient leur appartenance, leur religion et leurs origines font partie du même peuple, tels qu’ils sont, à égale dignité.

Le livre s’adresse à un grand public, musulmans comme non musulmans, avec la même grille de lecture : proposer un discours rationnel et pédagogique sur les questions d’islamophobie, fournir des arguments solides pour démonter les récits racistes les plus fréquents, réhumaniser les musulman-e-s dans toute leur diversité, leur dignité et leur individualité. En bref : fournir une réponse humaniste et lucide à ceux qui tentent, par tous les moyens, de construire un « problème musulman ».

Avec « Nous (aussi) sommes la nation » est-il question d’une responsabilité littéraire ?

Marwan Muhammad – Avant d’être une responsabilité littéraire, il s’agit pour moi d’une responsabilité éthique et personnelle. Je ne sais pas ce que sera demain ni ce que sera mon futur, mais j’ai écrit ce livre comme un témoignage de ce que nous traversons, dans la France de 2017, en essayant de ne pas tomber, ni dans la défiance, ni dans la posture victimaire, mais en dressant un tableau clair des problèmes actuels, tout en proposant des solutions. Comme dans tout ce que j’entreprends, j’ai essayé de fournir un travail soigné, des exemples choisis au style d’écriture, parce qu’un livre n’est pas uniquement une somme d’informations décousues, mais un acte littéraire à part entière. J’espère que les lecteurs et lectrices prendront donc plaisir à le lire et se retrouveront un peu, quel que soit leur parcours personnel, dans tout ce que j’évoque. J’aimerais qu’ils ressortent de cette lecture avec une meilleure compréhension, mais surtout animés d’espoir et de détermination. Le sujet que je traite est un enjeu de génération.

Quelle place prend ce livre dans votre vie ?

Marwan Muhammad – Une place très importante. C’est mon deuxième livre, celui que j’ai le plus pensé, compte tenu de l’importance du sujet, des attentes et des enjeux. C’est aussi une page tournée : il fallait témoigner et construire une analyse complète de ce qu’est l’islamophobie et des moyens de l’endiguer. J’espère y avoir modestement contribué, après d’autres militants et universitaires avant moi. A chaque lecteur maintenant de s’en saisir, de le comprendre, de le partager et d’en faire une œuvre utile. C’est aussi, sur le plan personnel, un héritage que je laisse à mes enfants, pour qu’une fois adultes, ils sachent ce qui animait leur papa, quand ils n’avaient pas encore l’âge de le comprendre entièrement par eux-mêmes. Enfin, dans le livre, je parle de mon enfance et de mes parents : quoi que je fasse ou réussisse dans ma vie, ils en sont les premiers témoins et les premiers à remercier, par l’éducation qu’ils m’ont donnée et les valeurs qu’ils m’ont transmises. Ce livre, c’est aussi une manière de rappeler la contribution de nos parents, même si elle s’exprimait autrement, toujours avec honneur et dignité.

Les commentaires de lecteurs de tous horizons (Belgique, France, Canada) fusent sur les réseaux et les lecteurs accueillent l’ouvrage avec enthousiasme, une traduction de l’ouvrage anglaise est-elle envisagée ?

Marwan Muhammad – Pas à l’heure actuelle, mais pourquoi pas plus tard. Le livre doit d’abord faire son chemin, rencontrer son public dans les espaces francophones, premièrement concernés par mon propos. C’est vrai que les commentaires et les retours de lecture sont très positifs, mais attendons de voir comment les lecteurs vont s’en saisir. Je suis particulièrement touché par celles et ceux qui, déjà, s’approprient son contenu pour en être des ambassadeurs. Ça me donne de l’espoir et c’est comme un passage de témoin. S’il devait y avoir une version anglaise, je pense que je retravaillerais une partie du texte pour ouvrir sur les questions internationales et bien prendre en compte les différentes formes que prend l’islamophobie, en fonction du pays. En matière de racisme visant les musulmans, la France n’est pas une exception, mais elle a ses spécificités. Pour l’heure, j’aborde la promotion du livre avec calme et enthousiasme. Voyons ce que ça donne.

Un livre disponible en version papier et numérique ici, il est possible d’en lire un extrait :

Une vidéo qui présente le livre sur la page officielle de Marwan Muhammad

https://www.facebook.com/MarwanMuhammadOfficiel/videos/831015567037682/

Propos recueillis par Isabelle Catiau-Allouchi

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