Ma vie avec la sclérose en plaque

Salamouarlaykoum. 

Je m’appelle Lamia, je suis mariée et j’ai 4 enfants âgés de 6, 3 (des jumeaux) et 6 mois. Jeune femme trentenaire, je suis pourtant atteinte de sclérose en plaques (communément appelée SEP), je fais partie des 80000 atteints en France. « Il s’agit d’une maladie auto-immune dégénérative du système nerveux central, ce qui implique que le système immunitaire de la personne atteinte, qui devrait normalement être dirigé vers les menaces externes, se retourne contre les cellules de la moëlle épinière et du cerveau de l’individu. Elle est dite « incurable » » Source (mais je sais que inchaAllah moi, je vais guérir). Elle se manifeste de différente manières selon les malades. En ce qui me concerne je suis surtout touchée au niveau des jambes avec une perte de force (particulièrement la droite), l’oeil gauche (je vois flou régulièrement d’un coup) et une grosse faiblesse des membres supérieurs, sans oublier mes problèmes d’équilibre, les vertiges avec lesquels je vis quotidiennement, en effet je suis vite perdue quand il n’y a pas de murs à proximité je perds l’équilibre et souffre de fatigue chronique. J’ai des problèmes de mémoire, de concentration et d’élocution. Elhamdoulillah. 

Les premiers symptômes

Tout a commencé à ma dernière grossesse, vers 5/6 mois de grossesse en me levant de ma chaise et voulant prononcer un mot je me suis trouvée bloquée. Impossible de prononcer quoique ce soit et de bouger mon bras droit. J’ai laissé passé… Cela n’a duré que quelques secondes et ça ne s’est pas reproduit dans la journée. Mais j’ai eu peur. Il se passait quelque chose dans mon corps que je ne pouvais pas contrôler. J’ai préféré occulter. 

Une fois je marchais, je me suis retrouvée par terre, l’impression que quelqu’un m’avait donné un coup derrière le genou pour le faire fléchir violemment. Sauf qu’il n’y avait personne. Mon genou s’est dérobé. Je me suis relevée. Et j’ai encore préféré occulter. Je me suis relevée, pourquoi allais-je m’inquiéter ? Je suis enceinte, que peut-on faire ? J’ai préféré de nouveau oublier… 

Ma grossesse s’est terminée, avec parfois encore quelques incidents comme ceux ci. Je ne disais rien. 

J’ai eu comme prévu ma césarienne. Je me reposais. On s’occupait de bébé. J’étais bien. 

Je suis rentrée à la maison et là, à plusieurs reprises, je me suis retrouvée paralysée du côté droit à chaque fois quelques secondes avec la langue totalement paralysée impossible de parler, d’appeler quelqu’un…

Le basculement dans la maladie

On s’est inquiétés. Le Samu est venu. Et là, la batterie d’examens a commencé, je commence doucement à basculer dans le monde… dans le monde des malades, dans une nouvelle vie… Je me souviens, une fois attendant un résultat IRM, avoir dit à mon époux : « Ça sera donc ça ma vie, c’est ça qui m’attend ? D’IRM en prise de sang, en passant par les laboratoires, et les hospitalisations de jour ? ». On sentait mon mari et moi que ce n’était pas de simples examens, on sentait que c’était une recherche, on cherchait quelque chose, on cherchait une maladie. La radiologue me reçoit et me dit que c’est neurologique. L’hôpital me convoque pour un RDV neuro, un service que je ne connais pas. Je connais la maternité, la pédiatrie, les urgences, la médecine générale, je ne connais pas la neurologie. Je ne sais même pas ce qu’elle sous entend. Je ne fais aucune recherche, je suis une passionnée de doctissimo, wikipédia, mais là je ne fais aucune recherche. 

Je suis dans le bureau de la neurologue quelques jours plus tard. « Vous voyez madame : ceci est un cerveau sain. Et celui ci est le votre. Nous devons chercher d’où viennent ces anomalies. Revenez demain pour une hospitalisation de 3 jours, nous ferons une ponction lombaire et un bilan sanguin et d’autres examens. », ceci est bien entendu un résumé de notre entretien, qui fut plus houleux que ça.

Là, je lui demande si ça peut attendre un peu. Elle me dit non. Ça veut dire quoi non ? Ça veut dire qu’il faut se dépêcher. Serait-ce urgent ? Serait-ce inquiétant ? Je m’inquiète… Mais je ne montre rien, d’ailleurs la veille de ma ponction nous faisons un grand pique-nique avec plusieurs sœurs et nos enfants, j’ai décidé que « la période ponction » serait associée à un joli souvenir inchaAllah. Et quel souvenir ! Cette veille d’hospitalisation nous avons passé un bon, un très bon moment avec les sœurs et leurs enfants.

Je rentre pour cette fameuse ponction. Je refuse de passer deux nuits hospitalisée. J’ai 4 enfants et l’unique nuit passée dans ce service fut atroce, les personnes âgées souffrent tellement la nuit, et j’entendais, j’absorbais leur souffrance.

Et là je vois celle qui allait devenir ma neurologue de ville pour le diagnostic, quelques jours plus tard.

Elle m’annonce que c’est la sclérose en plaque. Mais qu’est ce que la sclérose en plaque ? Je ne connaissais pas cette maladie. Et soubhanAllah, je suis jeune pour être suivie par un docteur qui suit des Parkinson et des Alzheimer, j’ai peur, mais je ne montre jamais rien à personne, je fais comme toujours soit le clown, soit l’autruche.

Je l’écoute. Elle m’explique les suites de mon suivi. Etc. Je ne réalise pas tout de suite.  Elle me donne beaucoup de documentation sur ma maladie, elle me donne des livres à lire à mes enfants. J’étais venue avec mes parents, en sortant de la consultation je leur dis avec un grand sourire « bah c’est bon c’est ça, c’est la sclérose en plaque », on s’en doutait mais on se voilait la face, j’entendais le terme à l’hôpital mais je l’occultais, je suis la reine de la politique de l’autruche.

Au quotidien, à ce moment là, je n’ai pas l’impression d’avoir changé. Ma vie est la même. 

J’ai l’impression que ça va.

Sauf que les séquelles qu’à laissée ma poussée sont présentes. En effets ces paralysies que je faisais après l’accouchement étaient les symptômes d’une poussée (une sorte d’attaque de la maladie). Mais je ne le savais pas. Je suis sous traitement, ça calme clairement mes paralysies, mais ça me coupe la faim, et j’en suis dépendante, si je saute une prise, mon corps tremble, surtout mes mains.

Ma neuro décide de me mettre sous corticoïdes pendant 3 jours pour récupérer de la force. J‘ai 4 enfants dont un bébé et elle a peur que je le fasse tomber ou que je tombe avec bébé dans les bras. 

Mon quotidien : des hauts et des bas

C’est difficile. Les séquelles commencent à se faire ressentir. Mes jambes fatiguent vite. Conduire est parfois difficile. 

Je porte bébé d’une certaine manière mais je ne m’en rend pas compte. J’ai pris le réflexe de la tenir de manière à ce que si je tombe il ne lui arrive rien. 

J’ai une voix qui porte habituellement, mais, j’ai appris à parler doucement. 

Je criais souvent sur mes enfants, je ne le fais plus. Car j’ai toujours cette peur d’avoir un blocage devant mes enfants.

En conséquence, j’ai appris à être plus patiente avec mes enfants, avec les autres. 

J’ai eu beaucoup de basÉnormément. Beaucoup de moments où je me sentais perdue, dans le noir, où je jetais mon tapis en suppliant Allah d’être à mes cotés, en Le suppliant de me protéger, Le suppliant d’être Mon Meilleur Allié, surtout quand j’ai un moment dur physiquement. J’ai beaucoup pleuré. J’étais quelqu’un de dynamique. Je me retrouve freinée. Je pleure encore souvent, quand ma mère vient m’aider à la maison en faisant comme si c’était naturel, j’ai du mal à l’accepter encore, à l’admettre. Oui, c’est moi qui devrais ranger sa maison, et pas le contraire, puis je me ressaisis et je demande à Allah de donner la santé à ma mère pour qu’elle soit toujours présente pour moi.

Ceci dit je suis au début de la maladie. Je ne la connais pas. Il y a un 7ieme membre maintenant dans ma famille. Il s’appelle SEP. Ce n’est pas mon ennemie. C’est une colocataire avec qui je dois faire. 

Les symptômes sont « bizarres ». Le mari d’une amie atteinte aussi l’appelle la maladie capricieuse. C’est vrai. Elle est capricieuse. Tout va bien et puis un coup de fatigue en trop, un jour où je force un peu, un jour où simplement je fais deux « grandes choses » comme les courses et à manger (c’est simple mais maintenant c’est soit l’un soit l’autre, mais dans une même journée je ne peux pas faire deux choses) et bien je vais avoir une extrême fatigue ou avoir l’oeil flou quelques heures le lendemain ou avoir la jambe lourde. 

Il y a des matins je me réveille paralysée des mains. Ça dure quelques minutes à quelques heures. Avec des dou3a et quelques échauffements ça passe elhamdoulillah. 

Un corps plus faible, une foi plus forte

Depuis la sclérose en plaque je réfléchis d’avantage. Je médite d’avantage. J’écoute plus le coran. Je le lis d’avantage. Je médite sur ses versets. Car avant je me préoccupais beaucoup de mon foyer, de l’éducation de mes enfants. Mais je laissais la mienne de côté. Je n’approfondissais plus depuis quelques années déjà. 

Aujourd’hui je remercie Allah de m’avoir donné cette épreuve plutôt qu’une autre plus difficile encore. Qu’Allah facilite à mes frères et sœurs atteints de maladies dures, lourdes, bien plus difficiles que la mienne.

Elhamdoulillah c’est moi qui vit ça et pas un de mes enfants. Elhamdoulillah c’est maintenant et pas il y a dix ans. Elhamdoulillah j’ai pu faire mes voyages, effectuer mon pèlerinage dans la santé. Avoir mes enfants. Allahou Akbar !

J’ai fait de merveilleuses rencontres, des re-rencontres, machaAllah, je me découvre.

Je ne suis pas fâchée de mon sort. Mais je me sens seule même si je sais qu’Allah est Mon Meilleur Compagnon et Allié. Je me sens seule dans mon combat. C’est mon combat, c’est moi qui passe cet examen, et c’est moi que l’Examinateur surveille. Même si Elhamdoulilah ma famille est très présente. Mon mari énormément aussi. Il ne peut pas être plus présent, aidant et aimant qu’il ne l’est. Dans mon cœur il y a Allah, autour de moi il y a ma famille, ma mère, mes proches, mes enfants, mon mari, mes amies, mais dans ma tête je suis seule. Incomprise. Personne n’est dans mon corps. Personne ne comprend.  

Car moi même, parfois, je ne me comprend pas depuis que j’ai cette nouvelle colocataire…

walhamdoulilah.

Qu’Allah protège et préserve ma mère, qui m’a portée, veillée quand j’étais petite, et aujourd’hui est toujours là. Je t’aime Mama et pardonne moi pour la tristesse que je te cause.

Imane Magazine remercie profondément notre soeur pour ce témoignage magnifique, d’une force et d’une lucidité poignantes. Lamia souffre un peu de sa solitude face à sa maladie et aimerait énormément rentrer en contact avec des soeurs souffrant de la même affection. Si vous désirez rentrer en contact avec elle, nous lui donnerons vos coordonnées (ne mettez pas vos adresses mail en commentaire pour des raisons évidentes de sécurité. Nous lui donnerons l’adresse mail que vous aurez entré pour validation du commentaire inchALlah)

50 réflexions sur “Ma vie avec la sclérose en plaque”

    1. Salam alikoum je viens d’apprendre que j’ai la sep J’aimerai rentrer en contact avec toi inchallah Jai 31 ans et 4 enfants

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