Ma vie en Palestine…

En cette journée de commémoration de la Nakba du 15 mai 1948, lisez ce témoignage émouvant d’une soeur Palestinienne. Pour en savoir plus sur la Palestine, son histoire et la redécouvrir sous une lumière nouvelle, procurez-vous le Imane Magazine « Palestine en plein coeur ». 

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Témoignage de Oum al-Batoul

Avant de parler plus intimement de ma situation personnelle, il me semble intéressant de faire comprendre et connaitre les spécificités de la société palestinienne.

La société

Dans la société palestinienne, la famille a une place prépondérante, en ce sens que c’est elle qui éduque et qui permet à l’enfant de se développer harmonieusement. De nature conservatrice, la famille est donc un cadre référent pour l’enfant et c’est elle qui lui inculque les comportements et les valeurs morales à adopter en société, qui lui donne son héritage traditionnel et qui est le moteur de sa croissance.

Par ailleurs, une des particularités de la Palestine est que le cercle familial est étendu aux différentes relations (voisins, amis, etc.) car le pays est historiquement ancré dans une tradition agricole et dans un héritage générationnel, avec des régions qui ont des coutumes spécifiques. On remarque ainsi que paradoxalement l’occupation israélienne, au lieu de détruire une identité, a certes perturbé l’harmonie et le fonctionnement de la vie mais elle a renforcé la cohésion en élargissant la notion d’appartenance territoriale : les Palestiniens ont un sentiment d’appartenance très puissant, le peuple est devenu la famille.

La famille inculque l’amour de la patrie et le devoir de se sacrifier pour celle-ci. La société palestinienne a connu des transformations profondes dans différents domaines de la vie sociale, économique et culturelle, en particulier suite aux différentes Intifada qui avaient pour objectif de libérer la terre et les Hommes et qui ont donné naissance à un Etat palestinien qui malgré ses manquements, défaillances et lacunes a tout de même permis de mettre en place des projets de développement qui ont influé directement sur le quotidien des Palestiniens. Ça a encouragé l’agriculture, la création de coopératives agricoles et industrielles ou encore la construction d’universités généralistes et spécialisées. Malgré ces efforts, le retard accumulé est tel que la mise à niveau ne peut être que le fruit d’un long et laborieux processus.

Qui est l’enfant palestinien ?

L’enfant palestinien vit dans un monde qui est aux antipodes de l’environnement normal des enfants du reste du monde. Leur univers est caractérisé par le manque, la pauvreté, la violence et ils sont privés des principaux droits que leur garantissent normalement les accords internationaux.

Citons :

  • – Le droit à la vie : le fait d’être un enfant ne les prémunit pas des balles de l’occupation…
  • – Le droit à l’éducation : en 2006 plus d’1 600 000 enfants palestiniens n’ont pas pu commencer leur année scolaire normalement. Ils ont pris un retard de 2 mois et leur année a failli se perdre. En plus, les soldats empêchent beaucoup d’enfants d’atteindre leur école. Où est ce droit universel à l’éducation ?
  • – Le droit à une alimentation saine et équilibrée. De nombreux enfants souffrent de malnutrition en raison de la pauvreté, et cela en particulier dans les camps de réfugiés.
  • – Le droit à l’accès aux soins
  • – Le droit à la sécurité et à la tranquillité. L’enfant palestinien n’est en sécurité nulle part : il est tué dans les écoles, dans les maisons, etc. Tout est bombardé, il y a des interpellations sauvages, des intrusions dans les foyers et des arrestations  intempestives et injustifiées. Il est sous la menace permanente et dans un état de peur continu.
  • – Le droit à l’insouciance
  • – Le droit à la liberté

Il y a en Palestine une enfance innocente avec des droits bafoués. Les yeux des enfants pleurent de ces injustices sous le regard fuyant des défendeurs des droits de l’Homme. L’enfance est amputée et leur avenir est sacrifié alors qu’ils n’ont commis aucun péché, hormis le fait d’être nés Palestiniens. Nos petits invoquent Dieu sans relâche pour changer leur situation et gardent l’espoir d’un avenir plus heureux.

Ma vie dans les territoires occupés

Nous sommes une famille de classe moyenne qui essaie de vivre convenablement. Mon mari travaille dans une boulangerie et gagne correctement sa vie alhamdoulillah. On essaie de mettre à disposition de nos enfants tout ce qui leur faut pour vivre décemment et nous avons l’espoir que l’éducation qu’ils reçoivent leur permette d’améliorer leur situation sociale et de parvenir à vivre avec fierté dans cette terre violée.

Nos journées sont influencées par les événements extérieurs. Lorsque tout est « normal », la famille se réunit après une journée de travail à la maison ou à l’extérieur autour d’un dîner et après nous nous préparons pour faire la prière de la ‘Icha, nous regardons la TV. En été, on profite des journées plus longues et chaudes pour parfois visiter ou recevoir des proches.

En période de conflit, on vit au rythme des informations et on oscille entre peur et impatience en attendant d’avoir des nouvelles qui apaisent nos craintes.

Il ne faut également pas oublier que beaucoup de familles palestiniennes se réveillent aux aurores durant les week-end pour aller rendre visite à leurs enfants emprisonnés dans les geôles israéliennes, et si on voulait parler de la souffrance et de l’injustice subies par ces familles là le sujet serait intarissable. Malgré tout cela, nous résistons car nous sommes dans notre bon droit et inchAllah bientôt cette obscurité disparaîtra et la lumière percera.

Le droit élémentaire d’un enfant d’avoir un logement dans lequel il peut se réfugier est absent dans la mesure où sa maison est toujours une cible potentielle de destruction. L’argument avancé par l’occupation est que la construction a été faite sans autorisation d’Israël. Dans notre cas, ils nous ont imposé une amende de 15000 dollars, et si elle n’est pas payée notre maison sera détruite. Nous nous sommes orientés vers le tribunal pour voir comment échelonner le paiement car notre situation économique ne nous permet pas de régler cette somme d’une seule traite. Notre cas est loin d’être isolé, tous nos proches et voisins subissent le même sort, alors que dans le même temps les colonies poussent sur nos propres terres, en toute illégalité et en toute impunité…

En ce qui concerne le simple trajet entre le domicile et l’école, je jure par Dieu qu’à chaque fois qu’on laisse nos enfants partir, on leur fait nos adieux. Brimades et humiliations de la part des soldats sont leur lot quotidien. Un jour, les enfants ont été encerclés dans leur école pendant plus de 4 heures en raison de jets de pierres. C’est grâce à l’arrivée des mamans venues chercher leurs enfants en criant et en pleurant qu’ils ont pu sortir sains et saufs. Cela s’est deroulé dans un village proche de Jérusalem. Malgré toute cette injustice nos enfants refusent de courber l’échine et essaient toujours de continuer leur résistance en continuant à aller à l’école.

Quand je pense au problème palestinien j’estime que nous avons le total droit de récupérer nos terres jusqu’au dernier mètre carré mais en même temps tout être humain sensé ne peut ignorer la réalité actuelle qui se manifeste par la présence de 5 millions de Juifs qui se réclament les habitants d’un Etat nommé Israël et qui pensent aussi qu’ils ont le droit d’avoir un pays. Est-ce qu’on peut imaginer une solution qui nous permettra de conserver nos droits historiques sur notre sol ? Il est évident que nous allons nous confronter à une situation très difficile avant de parvenir à répondre à cette question.

Quand aux habitants de Gaza, aucun foyer n’est épargné : un martyr, un prisonnier, un blessé, un handicapé, une maison détruite, des terres confisquées, des gens interdits de voyager, des gens interdits de tout regroupement familial,des gens interdits de travailler, des gens privés d’éducation, etc.

La victoire est proche inchALlah, l’espoir de libérer le masjid al-Aqsa de l’injustice et de l’usurpation est vif afin d’ouvrir ses portes pour tous les musulmans du monde entier, quel que soit leur âge. Notre espoir est de libérer nos prisonniers et de les voir retourner dans leur foyer. Nous espérons qu’Allah règle nos soucis ; nous espérons que nos enfants reçoivent la science utile et qu’ils en soient fiers. Nous espérons nous sentir en sécurité et avoir la tranquillité d’esprit. Nous espérons réunir tout le peuple palestinien et  faire revenir les exilés qui ont été forcés de quitter leur terre et leur maison. Nos espoirs sont nombreux mais nous demandons à Allah de les combler car c’est Lui notre Allié et qu’IL est le Seul capable de nous exaucer.

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